
Sara Emami
Née en Iran et aux Pays-Bas, Sara Emami est une illustratrice célébrée pour son œuvre colorée, qui transcende les frontières et les cultures. S’inspirant de ses racines et de ses expériences, les illustrations de Sara sont le reflet des diverses influences culturelles dont elle est issue. L’inspiration des bleus des mosquées d’Ispahan ainsi que ses récits personnels constituent le tissu et le vocabulaire poétique distinctifs de l’illustratrice.
Sara, qui es-tu?
Je suis née en Iran, mais ma famille a déménagé aux Pays-Bas lorsque j’avais un an. Enfant, je me suis intéressée à l’architecture après avoir vu les mosquées d’Ispahan et j’ai finalement étudié le design industriel et d’interaction à l’Université de technologie de Delft.
J’ai toujours eu des affinités pour le design au sens large du terme, que ce soit le design textile, la mode, le design d’intérieur. Ce goût prononcé ne m’a jamais quitté. L’illustration faisait partie d’un de ces centres d’intérêts périphériques, qui, depuis quelques années est devenu un axe créatif plus sérieux.
N’ayant aucune formation en art ou en illustration, je me suis souvent sentie illégitime. Néanmoins, j’ai quand même choisi d’embrasser ma passion pour l’illustration. Je partage ainsi mon temps, entre mon activité professionnelle en tant que designer UX chez Philips et et ma pratique de l’illustration le soir.



Quel est ton processus créatif ?
Les thèmes explorés ont toujours quelque chose de très personnel. J’aime ajouter des éléments oniriques comme des nuages portant un regard attristé sur le monde ou les doter de paroles. J’aime aussi beaucoup travailler les oiseaux et des fleurs. Mon processus créatif est le reflet de celui de mon imagination ; je suis une rêveuse.
Cela dit, avoir un emploi à plein temps avec deux enfants ne permet pas de passer beaucoup de temps sur le processus créatif. C’est donc souvent une étape spontanée. Par exemple, je visualise et conçoit mon idée sur le chemin du travail à vélo, et c’est à la pause déjeuner que j’en fais un rapide croquis sur un post-it – ou sur n’importe quel support qui me permette de dessiner.

Liberté, droits des femmes et illustrations
J’ai commencé à créer des visuels il y a plusieurs années qui explorent un style narratif et des récits personnels. L’année dernière, lorsque les manifestations pour la Vie, la Liberté des Femmes ont éclaté en Iran, j’ai ressenti le besoin de devoir de contribuer à ce mouvement de manière significative.
Je savais qu’il y avait de fréquentes et sévères censures sur Internet et ainsi que sur la couverture journalistique. Les gens risquaient leur vie pour partager les événements en cours sur les réseaux sociaux. J’ai décidé alors était d’aider à diffuser les visuels soutenant leur cause et leur manifestations. C’était le moins que je puisse faire. Étant aussi mère avec un emploi de designer à temps plein, j’ai utilisé ce qu’il me restait de mon temps à créer des illustrations en soutien au mouvement Iranien et ainsi montrer ce qu’ils vivent en ces temps critiques.

Quels sont tes prochains projets créatifs?
J’ai hâte de publier de nouveaux récits visuels et aussi de dessiner des figurines Pokémon pour mes enfants parce que cela les rend heureux, Je souhaite aussi redécorer nos chambres avec du papier peint et essentiellement, ne jamais cesser d’être créative.

Une passion pour le bleu
Mon amour pour la couleur bleue a commencé de manière fortuite lors d’un dîner chez un ami, une histoire que je partage avec tout le monde.
À table, une bouteille bleu cobalt a attiré mon attention, remplie d’eau. J’ai été tellement fascinée par sa couleur que mon ami a fini par me l’offrir. Cet instanr a marqué le début d’une longue collection de choses en bleu, à commencer par des verres et des vases. C’était il y a plus d’une décennie.
Avec le temps, j’ai élargi mon amour du bleu à mes vêtements, à la décoration intérieure et à mes illustrations. La couleur bleue c’est ma manière personnelle de donner un sens au monde. Il y a tellement de choses dans la vie qui échappent +a notre contrôle. Le bleu est mon point d’ancrage réconfortant.
Espoirs & inspirations
Où cherches-tu ton inspiration?
Je recherche l’inspiration partout. Je vis près de l’eau. Cela m’inspire et me donne un véritable sentiment de paix. Aller travailler tous les jours en vélo est une autre source d’inspiration. Cela me permet de rêver, de me vider la tête des choses superflues. J’aime faire du vélo aux Pays-Bas, surtout quand le temps y est clair. Les Pays-Bas ont un ciel qui est beau et je dirais même qu’ils ont les plus beaux nuages. Je suis toujours inspirée par la présence de la nature, par l’art, et j’aime particulièrement visiter les musées. Cette année, j’ai visité Florence pour la première fois et j’ai apprécié d’en apprendre plus sur le précieux patrimoine artistique de la ville, après avoir visité Rome et Venise il y a quelques années.
Quels sont tes espoirs pour l’avenir?
Je me sens parfois anxieuse par rapport aux implications du changement climatique et au monde dont nos enfants vont hériter. J’espère sincèrement que les gouvernements finiront par prendre des mesures pour un avenir durable. Sur une note plus immédiate, mon souhait est une réduction du nombre de dictatures à travers le monde. Elles sont encore responsables de la destruction tragique de nombreuses vies humaines.




Qu’est-ce qui vous rend vraiment heureuse et vous fait évoluer?
Si mes enfants sont heureux, je suis heureuse. En toute honnêteté, c’est la chose la plus importante pour moi. Ce qui me fait évoluer, c’est l’introspection. Cela me permet de contempler les choses, d’envisager les choses sous un autre angle. Cela me permet de penser comment devenir une meilleure mère ou une meilleure partenaire. Grandir et évoluer c’est essayer de nouvelles choses, c’est éviter de rester trop longtemps dans sa zone de confort, et c’est aussi prendre des risques, des décisions inattendues.
Quelle est votre vision?
Je défends les droits des Iraniens qui aspirent à la liberté – une vie de liberté pour tous, particulièrement la liberté d’expression et la créativité artistique.

Artisanats, textiles et mode
Quelle est votre approche personnelle de l’artisanat et de la production locale ?
Parce que j’ai étudié le design, je sais à quel point, donner vie à une idée et en faire un produit tangible est un processus complexe. Pour cette raison j’affectionne et ai beaucoup de respect pour l’artisanat. Moi-même designer, je me sens aussi responsable de soutenir des petites entreprises et les productions locales. Avant l’arrivée d’Instagram, je passais des heures sans fin sur Etsy, à chercher et acheter des objets d’artisan auprès de petites marques.
Quelle est votre relation avec la mode?
J’ai toujours aimé la mode. Au départ, j’étais plutôt passionnée par les textiles et les matières car j’ai toujours apprécié la qualité des produits, les couleurs et les motifs. Adolescente, je me souviens très clairement de ma réticence à acheter des vêtements dans les mêmes magasins que les autres enfants. Découvrir mon style, développer ma palette de couleurs a pris quelques années. J’ai toujours cherché au travers de la mode un moyen pour m’exprimer.
La collection de Florenz en quelques mots?
Douce, confortable et chaleureuse.

